L’enregistrement d’une personne gardée à vue pour un reportage sans son consentement porte atteinte à sa vie privée !
L’arrêt rendu par la Chambre Criminelle de la Cour de Cassation le 21 avril 2020, confirme que l’enregistrement de la parole ou de l’image d’une personne placée en garde à vue constitue une atteinte à l’intimité de la vie privée de la personne gardée à vue lorsque cette dernière n’a pas donné son consentement.
Dans cette affaire, une femme avait été arrêtée pour des faits de proxénétisme aggravée.
Lors de son placement en garde à vue elle a été filmée, et cela a été retransmis à la télévision par la chaîne W9 le 18 janvier 2013, lors d’un reportage intitulé « Prostitution : les nouvelles esclaves du trottoir, les nouveaux visages de la prostitution ».
Ce reportage avait pour sujet les réseaux de prostitution et notamment sur la surveillance d’un hôtel géré par cette femme, lieu dans lequel des prostituées exerçaient leur activité.
Cette femme a alors porté plainte auprès du procureur de la République des chefs de violation du secret professionnel et du secret de l’instruction après la diffusion de ce reportage car des tiers l’avaient reconnues.
Cette plainte a été classée sans suite.
Alors elle porte plainte une seconde fois en se constituant partie civile auprès du juge d’instruction. Elle fait valoir une atteinte à l’intimité de sa vie privée , mais le juge d’instruction rend une ordonnance de non lieu.
Par la suite, la chambre d’instruction estime qu’elle avait la possibilité de faire valoir son opposition à l’enregistrement, et il n’y a pas de violation de sa vie privée.
La femme forme un pourvoi en cassation.
La chambre criminelle se fonde sur l’article 226-1 du code pénal, incriminant « le fait, au moyen d’un procédé quelconque, de porter volontairement atteinte à l’intimité de la vie privée d’autrui, en enregistrant des paroles prononcées à titre confidentiel sans le consentement de leur auteur, ou en fixant sans son consentement l’image d’une personne se trouvant en un lieu privé ; que lorsque l’acte est accompli au vu et au su de la personne intéressée, son consentement est présumé si elle ne s’y est pas opposée, alors qu’elle était en mesure de le faire », afin d’affirmer que l’enregistrement est bien susceptible de constituer une atteinte à l’intimité de sa vie privée.
Cour de cassation, Chambre criminelle, 21 avril 2020, 19-81.507