Le témoignage anonyme en matière de sanctions disciplinaires

Le témoignage anonyme en matière de sanctions disciplinaires

De nombreuses juridictions admettent la possibilité de témoignages anonymes. Cependant, de par le risque et le doute que posent parfois ces derniers, ces témoignages sont parfois soumis à des limites ou doivent présenter des garanties.

C’est ce qu’exprime le Conseil d’État dans un arrêt du 5 avril 2023, sur fond de sanction disciplinaire.

En l’espèce, le litige opposait une employée contractuelle, temporairement suspendue, et son employeur, Pôle emploi.

Bien que ce litige ait tout d’un litige prud’homal, la mission de service public de Pôle emploi en fait un litige administratif, passant donc devant les juridictions correspondantes.

En effet, aux termes de l’article 28 du décret du 31 décembre 2003 fixant les dispositions applicables aux agents contractuels de droit public de Pôle emploi, ces agents peuvent subir une exclusion temporaire.

Le problème ici ?

Les faits reprochés à l’employée, bien que justifiant totalement une exclusion temporaire, n’ont été que rapportés par des témoignages anonymes (ou plutôt anonymisés par l’administration à la demande des témoins).
En principe, les témoignages anonymes sont admis dans toutes les branches du droit, mais possèdent une valeur probante très variable. Dans la plupart des branches, comme le droit du travail classique, ils sont cependant insuffisant pour justifier d’une décision.
Mais ici le problème n’était pas la validité des témoignages anonymes en tant que tels, mais leur validité lorsque l’employée a soulevée des doutes quant à leur authenticité ( aucune justification d’authenticité n’ayant été apportée ici).

Le Conseil d’État, s’alignant alors sur la décision de la cour administrative d’appel, explique alors que, si des témoignages anonymes peuvent être valables, ils doivent cependant être authentifiés d’une manière ou d’une autre en cas de doute soulevé par la partie en réponse quant à leur validité.

Ainsi, comme dans plusieurs autres branches du droit, le témoignage anonyme a perdu de sa force.

Reste à savoir si une telle décision sera mise en place en droit du travail de droit commun.

CE 5 avr. 2023, Pôle emploi, n° 463028 (mentionné aux tables du Lebon)

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