Immunité familiale et instruments de paiement
L’immunité familiale est un mécanisme ancien remontant au droit romain. En l’instituant, le législateur avait pour objectif principal de préserver la sphère familiale et la paix qui est censée y régner.
Ainsi, en vertu des articles 311-12 et 313-3 du Code pénal, « Ne peut donner lieu à des poursuites pénales le vol [et l’escroquerie] commis par une personne : 1° Au préjudice de son ascendant ou de son descendant ; 2° Au préjudice de son conjoint ».
Cependant, l’immunité peut être écartée au regard de la qualité de l’auteur des faits (article 311-12 2° b) du Code pénal) ou lorsque « le vol porte sur des objets ou des documents indispensables à la vie quotidienne de la victime » (article 311-12 2° a) du Code pénal).
Dans l’affaire présentée devant la Cour de cassation, le 14 juin 2023, il s’avère qu’un homme avait utilisé la carte bancaire de ses parents dans son intérêt personnel.
Or, la loi (article 311-12 2° a) du Code pénal) précise que la carte bancaire doit être considérée comme un objet indispensable à la vie quotidienne. Par conséquent, le vol d’une carte bancaire ne permet pas de se prévaloir de l’immunité familiale.
Cependant, qu’en est-il des faits d’escroquerie commis par le biais de cette carte bancaire ? L’immunité familiale peut-elle s’appliquer si la carte bancaire a servi à commettre l’infraction ?
Deux options s’offraient à la juridiction :
1. Une interprétation stricte de la loi : l’immunité aurait été écartée uniquement si la carte bancaire constituait le produit de l’infraction ;
2. Une interprétation plus libérale : l’exception serait étendue aux cas où la carte bancaire constituerait le moyen de l’infraction.
La Cour de cassation a ici préféré la protection des intérêts des ascendants, à la protection – peut-être – dépassée de la « paix des familles ».
Ainsi, elle précise que « le bénéfice de l’immunité familiale [est exclue] lorsque l’infraction commise porte, notamment, sur des moyens de paiement, comme une carte bancaire, ce qui couvre le cas où ces moyens de paiement constituent l’objet du délit d’escroquerie ainsi que celui où ils servent à le commettre. »