Le défaut de convoquer le salarié à l’entretien préalable avant de le licencier, représente une violation des droits de la défense qui entraîne la nullité du licenciement

Le défaut de convoquer le salarié à l’entretien préalable avant de le licencier, représente une violation des droits de la défense qui entraîne la nullité du licenciement

Le Cabinet ELLIPSIS a obtenu un autre jugement favorable devant le Conseil de Prud’homme, dans une affaire de droit du travail.

Cette fois-ci, il s’agit d’une décision inédite de CPH de Poissy, qui a fait l’application de l’article 6 de la Convention européenne des droits de l’homme à une procédure de licenciement.

Notre client, salarié d’une société de transport et livraison, a été licencié pour faute grave, sans avoir été convoqué à un entretien préalable.

Ainsi, le salarié n’a pas pu se défendre contre les allégations de son employeur, qui s’est contenté de lui notifier son licenciement par lettre recommandée.

N’étant pas informé de la nature et de la cause de l’accusation portée contre lui, il n’a pas disposé du temps et des facilités nécessaires à la préparation de sa défense.

De même, il n’a pas pu se défendre lui-même ou avoir l’assistance d’une personne de son choix conformément à l’article L. 1232-4 du Code du travail, et il n’a pas pu avoir accès aux éléments à charge afin de bien préparer sa défense et d’apporter des explications circonstanciées sur tous les griefs qui lui étaient reprochés.

Compte tenu de ces éléments, nous avons demandé au Conseil de Prud’homme de Poissy de déclarer le licenciement nul, sur le fondement de l’article L 1235-3-1 du Code du travail et de l’article 6 de la Convention européenne des droits de l’homme.

À cet égard, l’article L. 1235-3-1 du Code du travail dispose :

« L’article L. 1235-3 n’est pas applicable lorsque le juge constate que le licenciement est entaché d’une des nullités prévues au deuxième alinéa du présent article.

Dans ce cas, lorsque le salarié ne demande pas la poursuite de l’exécution de son contrat de travail ou que sa réintégration est impossible, le juge lui octroie une indemnité, à la charge de l’employeur, qui ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois.

Les nullités mentionnées au premier alinéa sont celles qui sont afférentes à :

La violation d’une liberté fondamentale ; »

Ces dispositions doivent être corroborées avec les dispositions de l’article 6 de la Convention européenne des droits de l’homme dans son volet civil, qui stipulent :

« Droit à un procès équitable

1. Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial, établi par la loi, qui décidera, soit des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil, soit du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle.

Le jugement doit être rendu publiquement, mais l’accès de la salle d’audience peut être interdit à la presse et au public pendant la totalité ou une partie du procès dans l’intérêt de la moralité, de l’ordre public ou de la sécurité nationale dans une société démocratique, lorsque les intérêts des mineurs ou la protection de la vie privée des parties au procès l’exigent, ou dans la mesure jugée strictement nécessaire par le tribunal, lorsque dans des circonstances spéciales la publicité serait de nature à porter atteinte aux intérêts de la justice.

2. Toute personne accusée d’une infraction est présumée innocente jusqu’à ce que sa culpabilité ait été légalement établie.

3. Tout accusé a droit notamment à :

a) être informé, dans le plus court délai, dans une langue qu’il comprend et d’une manière détaillée, de la nature et de la cause de l’accusation portée contre lui ;

b) disposer du temps et des facilités nécessaires à la préparation de sa défense ;

c) se défendre lui-même ou avoir l’assistance d’un défenseur de son choix et, s’il n’a pas les moyens de rémunérer un défenseur, pouvoir être assisté gratuitement par un avocat d’office, lorsque les intérêts de la justice l’exigent ;

d) interroger ou faire interroger les témoins à charge et obtenir la convocation et l’interrogation des témoins à décharge dans les mêmes conditions que les témoins à charge ;

e) se faire assister gratuitement d’un interprète, s’il ne comprend pas ou ne parle pas la langue employée à l’audience. »

À cet égard, la Cour Européenne des Droits de l’Homme a retenu que l’article 6 § 1 du CEDH est applicable également aux contestations sur des questions sociales (Buchholz c. Allemagne, Requête n° 7759/77 du 6 mai 1981, Mihail Mihăilescu c. Roumanie, 2021, Guðmundur Andri Ástráðsson c. Islande [GC], 2020, Peleki c. Grèce, 2020).

En l’espèce, malgré le fait que notre client a été licencié pour faute grave, il n’a pas été convoqué à l’entretien préalable, procédure qui permet aux salariés d’être informés sur tous les griefs reprochés et de se défendre.

Or, le droit à la défense est une liberté fondamentale du salarié qui risque de perdre son emploi.

Par conséquent, la procédure de licenciement mise en œuvre par l’employeur ayant conduit au licenciement du salarié, a violé les droits de la défense du salarié.

Ainsi, le licenciement de notre client est nul pour non-respect des dispositions de l’article 6 de la Convention européenne des droits de l’homme et des libertés fondamentales, notamment en raison de la violation d’une liberté fondamentale caractérisée par l’atteinte portée aux droits de la défense.

Dans ce contexte, il est important de mettre en exergue que la procédure entamée par nos soins n’a pas visé l’irrégularité du licenciement pour un vice de procédure, mais le non-respect de l’article 6 du CEDH, le droit à un procès équitable dans son volet civil.

C’est justement la solution retenue lors de ce litige par le Conseil de Prud’homme de Poissy, qui a validé notre raisonnement, en constatant que le licenciement de notre client est nul et, à cet effet, a condamne l’employeur à verser des indemnités pour licenciement nul, des indemnités de préavis et des sommes au titre des congés payés afférents, avec intérêts légaux.

Ellipsis Avocats );