Véhicule accidenté : l’assurance peut-elle nous obliger à réparer ou peut-on choisir l’indemnité ?
Suite à un accident de la route, un expert est dépêché pour examiner le véhicule et calculer la valeur de remplacement (VRADE).
La jurisprudence définie la VRADE comme « le prix de revient total d’un véhicule d’occasion de même type et dans un état semblable » (Civ. 2ème, 12 février 1975, n° 73-13.263).
Dans l’hypothèse d’un véhicule réparable :
- Soit les coûts de réparation sont supérieurs à la VRADE et l’expert déclarera que le véhicule est économiquement irréparable
- Soit les coûts de réparation sont inférieurs à la VRADE et le véhicule pourra être réparé
Cependant, il arrive parfois que l’assuré estime personnellement que le véhicule est devenu dangereux, et que pour cette raison ou pour une autre, il ne souhaite pas le faire réparer.
L’assurance aura tendance à vouloir que l’assuré procède à la réparation préalable du véhicule avant de le rembourser, refusant de lui payer directement l’indemnité.
Mais, selon un avis de la Commission des clauses abusives du 1er janvier 1996 : « la clause subordonnant le versement de l’indemnité d’assurance à la justification de la réparation du véhicule prive le consommateur de la libre disposition de l’indemnité d’assurance et permet à l’assureur d’échapper à l’exécution de son obligation contractuelle dans le cas où l’assuré renonce à faire réparer son véhicule« .
Cette clause confère à l’assureur un avantage excessif sur l’assuré et constitue une clause abusive au sens de l’article L. 132-1 du code de la consommation.
En outre, la Cour de cassation rappelle dans un arrêt de la deuxième chambre civile du 19 novembre 1975 (n°74-13.018) que : « Le propre de la responsabilité civile est de rétablir aussi exactement que possible l’équilibre détruit par le dommage et de replacer la victime dans la situation où elle se serait trouvée si l’acte dommageable ne s’était pas produit. La réparation intégrale du dommage causé à une chose n’est assurée que par le remboursement des frais de remise en état de la chose.«
Au surplus, la victime doit pouvoir disposer de la totalité des fonds constitutifs de l’indemnité qui lui a été allouée « sans qu’elle soit pour autant tenue d’y procéder préalablement » (Civ. 2ème, 21 octobre 1987, n°86-12.623).
Dans le même sens, la Cour de cassation dispense la victime de justifier « avoir fait effectuer les réparations évaluées par l’expert ou avoir acquis un véhicule semblable » (Civ. 2ème, 31 mars 1993, n°91-18.691).
En effet, « L’assuré peut disposer librement de l’indemnité qui lui a été allouée et le contrat conclu sur ce point entre lui et la société automobile qui avait établi le devis de remise en état du véhicule accidenté, devis dont le montant avait été approuvé par l’expert de la compagnie d’assurance, est opposable à cette dernière. » (Civ. 2ème, 14 février 1984, n°82-14.503).
Par ailleurs, il est des cas où l’assurance accepte une indemnisation au lieu d’un remboursement des réparations, mais en cherchant à déduire certaines taxes.
Les mêmes arrêts viennent s’opposer à cette solution :
- « l’intégralité du coût de la réfection de son véhicule accidenté, en ce compris la TVA non récupérable en l’espèce, qu’en effet le montant de cette taxe, qui fait partie intégrante des dépenses à exposer pour la réparation du dommage subi, doit dès lors être compris dans l’indemnité à allouer à la victime afin que celle-ci puisse disposer de la totalité des fonds qui lui sont nécessaires pour la remise en état de son bien sinistré » (Civ. 2ème, 21 octobre 1987, n°86-12.623)
- « encourt la cassation la décision qui condamne la société automobile à rembourser à la compagnie d’assurance le montant de la taxe sur la valeur ajoutée aux motifs que cette société qui n’avait pas effectué les réparations s’était enrichie injustement et que le principe de l’effet relatif des contrats interdisait de conférer à la convention passée entre le garagiste et l’assuré des effets à l’égard de la compagnie » (Civ. 2ème, 14 février 1984, n°82-14.503)
En conclusion, la jurisprudence protège l’assuré et va dans le sens de la possibilité de percevoir une indemnité correspondant à la VRADE sans qu’il soit fait obligation de recourir à une réparation effective du véhicule accidenté et que le montant de l’indemnité soit amputé de taxes.