Le pouvoir d’appréciation du juge en matière de destruction, dégradation ou détérioration du bien d’autrui

Le pouvoir d’appréciation du juge en matière de destruction, dégradation ou détérioration du bien d’autrui

L’article 322-1 du Code pénal dispose que « La destruction, la dégradation ou la détérioration d’un bien appartenant à autrui est punie de deux ans d’emprisonnement et de 30 000 € d’amende, sauf s’il n’en est résulté qu’un dommage léger. »

Toutes ces formes de dommages causés au bien d’autrui rentrent donc dans la catégorie des délits.

Mais à quoi correspond « un dommage léger » ?

C’est ce que la Cour de cassation a étudié dans son arrêt du 23 mars 2023.

En l’espèce, un groupe de militants écologistes avaient recouvert de peinture des produits contenant du glyphosate (produit débattus ces dernières années comme polluant, mais pas interdit) dans plusieurs magasins de bricolage.

Poursuivis pour l’infraction citée précédemment (avec la circonstance aggravante du groupe, listée à l’article 322-3 du même code) ils sont d’abord relaxés en première instance, puis condamnés en appel à 300 euros chacun d’amende (léger en comparaison des 5 ans d’emprisonnement et des 75 000 euros d’amende possibles).
Déterminés à ne pas être condamnés, les intéressés ont alors effectué un pourvoi en cassation sur deux moyens : un premier, politique, rapidement écarté ; et un deuxième, basé sur un défaut d’appréciation du dommage par le juge.

En effet, le juge de première instance avait retenu que le dommage n’était que temporaire, la peinture ayant été facilement lavée par les magasins et les produits ensuite revendus (malgré le préjudice soutenu par les magasins). Il souligne donc un « dommage léger », comme cité précédemment.
Le juge d’appel, cependant, les condamne en considérant que des traces de peinture étaient restées, et que le dommage existe pour la vente. Il considère cependant que les faits ne sont pas contraventionnels, mais que des dommages-intérêts doivent être payés aux parties civiles.

C’est ici que les intéressés effectuent leur pourvoi en cassation : ils considèrent que le juge aurait dû déterminer l’altération de la substance du bien pour relever sa détérioration.

Le juge de cassation soutien alors le juge d’appel sur un principe très simple : le pouvoir d’appréciation souveraine du juge.

En effet, c’est au juge de déterminer ce qu’est, ou non, un dommage léger. Ou encore si l’infraction est contraventionnelle ou non.

Plutôt que d’apporter une réponse fixée aux cas de dégradation, le juge de cassation laisse donc encore une grande marge de liberté aux juges du fond.

Crim. 29 mars 2023, F-B, n° 22-83.911

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